EN TRAVERSANT
LA REPUBLIQUE DE COSTA-RICA
M. SAILLARD
1906
Nous
avons volontairement reproduit tel que les particularismes
orthographiques et grammaticaux des textes afin d’en
préserver la spécificité de l’époque…
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LA
LIGNE DE SAN JOSÉ A PUERTO
LIMON, SUR L'ATLANTIQUE, TRAVERSE DES PONTS QUI SURPLOMBENT
DES PRÉCIPICES
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Nous abordons
au Costa-Rica par Punta Arenas. - Un mélange de races.
- En route pour San José, capitale de la République.
- Voies ferrées et voies peu praticables, - San José,
ville d'aspect européen aux idées nord-américaines.
- Une promenade dans la ville. - Un théâtre sans
acteurs. - Les étrangers au Costa-Rica. - Le gouvernement,
l'instruction, l'armée, la police. - Les communications.
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UNE COSTARICIENNE DES
ENVIRONS DE SAN JOSÉ
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LE Guatémala
et le Costa-Rica sont en quelque sorte les deux pôles
de l'Amérique Centrale: le premier situé tout
à fait au nord, le second à l'extrême
sud. On peut dire les deux pôles, quoique nous soyons
ici en plein tropique, car les deux capitales Guatémala
et San José de Costa¬-Rica, placées à
une altitude assez élevée, connaissent des températures
très froides dans la saison d'hiver. Les deux républiques
peu éloignées l'une de l'autre, mais dont les
frontières ne se touchent pas, dont les habitants se
connaissent à peine, sont cependant les plus développées
et les plus intéressantes pour le voyageur, l'artiste
ou le diplomate.
Le Salvator
est infecté de fièvre jaune, le Honduras est
presque inaccessible. On tombe dans ce pays sur une barbarie
voisine du Moyen âge. Quant au Nicaragua, malgré
l'intérêt qu'offre son canal problématique,
la chaleur y est étouffante. Nous avons visité
le Guatémala et nous avons fait ici le récit
de ce voyage ; il est intéressant de le comparer au
Costa-Rica.
Le Costa-Rica possède
deux fenêtres sur la mer: par l'une le regard embrasse
l'Atlantique, par l'autre on a vue sur le Pacifique. Le Costa-Rica
se réduit en effet à une zone de territoire
très étroite, formant terrasse entre les deux
mers, à mi-hauteur d'une chaîne de volcans. Mais
ce plateau suspendu à plus d'un millier de mètres
en moyenne, est habité par une population offrant une
certaine originalité parmi les régions hispano-américaines.
Elle s'est mieux fondue en un corps de nation. A certains
égards Costa-Rica est le modèle des républiques
de l'Amérique Centrale. Abordons le pays par le Pacifique.
Punta Arenas,
le port où l'on débarque, se trouve niché
au fond d'une baie ravissante. Toute une escadre y manœuvrerait
à l'aise. Des deux côtés, des chaînes
de montagnes élevées viennent tremper leurs
derniers contreforts dans des eaux tranquilles et presque
douces, car d'impétueuses rivières se déversent
dans la baie de Fonseca. Souvent une cascade écumante
tombe d'une hauteur de 1000 pieds. La mer, presque tiède,
regorge de poissons, tandis que deux par deux ou quelquefois
seules, selon leur caractère, de larges tortues à
l'épaisse carapace se laissent porter au gré
des flots.
Punta Arenas
doit son nom de « Pointe de sable » à sa
position. La ville est en effet située sur la dernière
extrémité d'un promontoire très ensablé.
On débarque très facilement, car ici la marée,
arrêtée par la baie, n'a plus cette violence
des ports du Salvator ou du Guatémala. Une petite jetée
nous amène, sans secousse, à la ville.
Le port de
Punta Arenas est le plus important de toute la côte
du Pacifique de l'Amérique Centrale. Son aspect est
fort gracieux. D'énormes palmiers s'élèvent
dans toutes les rues, que bordent de petites maisons généralement
bâties en bois. Comme notre voyage a quelque chose d'officiel,
c'est musique en tête que le Gouverneur vient nous recevoir.
Après
quelques toasts échangés, nous faisons le tour
du propriétaire à travers le pays. Le climat
est terriblement chaud à Punta Arenas et c'est presque
un problème que d'y passer l'année d'un bout
à l'autre. La banane et le crocodile trouvent là
une température qui leur donne une vigueur et une force
extraordinaires, mais qui affaiblit les habitants à
un point extrême. De
nombreux Chinois se tiennent à la porte des boutiques.
Toute la côte du Pacifique, de San-Francisco à
Valparaiso, est d'ailleurs infestée de citoyens du
Céleste Empire. Cuisiniers, tailleurs, cordonniers,
mais surtout blanchisseurs, ils font une concurrence presque
toujours victorieuse, non seulement aux natifs du pays, mais
même aux étrangers. C'est la raison pour laquelle
l'Amérique du Nord leur a fermé ses portes;
Costa- Rica a imité cet exemple depuis peu de temps.
Nous côtoyons
aussi des nègres, des Indiens et des métis invraisemblables,
mélange de tous les sangs et de toutes les couleurs.
Eux seuls résistent victorieusement à la fièvre
jaune et aux accès de paludisme.
Après
avoir présenté nos respects à la femme
du Gouverneur, nous prenons congé des autorités.
Je profite de cette visite pour remarquer combien notre langue
est encore en honneur dans ces pays sud-américains.
Nos nouvellistes y sont toujours en vogue, et notre littérature
y tient la première place.
Au moment
où John Bull et son cousin Jonathan, tout aussi tenace
et plus entreprenant, tentent d'imposer leur commerce et leur
idiome dans l'Amérique Centrale, il y aurait un grand
intérêt pour la France à maintenir notre
langue, qui est plus populaire et plus facile à répandre.
C'est à nos consuls de tenter un effort dans ce
sens. Il faut louer à ce
PUNTA
ARENAS. UNE PETITE JETÉE
MÈNE A LA VILLE.
|
point
de vue M. Jarre, notre chargé d'affaires au Costa-Rica,
qui, par son influence, son énergie et son tact,
a su constituer le noyau d'une colonie française
qui allait perdre sa nationalité.
Un train
spécial devait nous conduire de Punta Arenas
à Esparleta, embranchement du futur interocéanique.
Pour le moment, il s'arrête à 20 kilomètres
de la côte. C'est d'ailleurs toute une aventure
que la construction d'un chemin de fer sud-américain.
Pour
tous ces Etats, le chemin de fer est d'une nécessité
qu'il est superflu de vouloir expliquer; il remplace
la route impraticable, donne et développe la
vie, régénère le pays, et l'ouvre
à la civilisation. Le Costa-Rica, le Nicaragua,
le |
Honduras et le Guatémala ont tous
leurs projets d'interocéanique.
Dans quelques ports
on entend le sifflet d'une locomotive, mais aucune ligne encore
ne franchit l'espace qui sépare un océan de
l'autre. Au Costa-Rica, c'est le beau-frère du Président
qui a entrepris cette construction. On pensait que dans l'espace
d'une année voyageurs et marchandises seraient transportés
à travers l'isthme, mais il ya trois ans que l'on travaille
à ce projet, et la concession vient d'être encore
prorogée pour deux années. C'est une trop belle
source de revenus, pour que les entrepreneurs ct autres intéressés
veuillent la tarir si vite. |
UN AMÉRICAIN A MONOPOLISÉ LE
COMMERCE DES BANANES |
Le train spécial qui devait nous emporter à
3 heures n'est venu qu'à 7 : tout le matériel
de la compagnie se composant d'une locomotive et d'un wagon,
il a bien fallu pourvoir au service ordinaire, pour nous emmener
ensuite.
Enfin on part
au milieu de vivats, cris et déploiements de mouchoirs.
La route monte en lacets, et c'est à travers une végétation
des tropiques que nous arrivons à Espateta, petite
station sans intérêt. Un diner magnifique nous
repose de nos fatigues: une série de toasts accompagne
ce banquet digne de Pantagruel. Un bon curé but aussi
à la France, « patrie de Chateaubriand et de
Victor Hugo, berceau des plus nobles idées, cerveau
du monde ». J'étais confus de cet éloge
et je remerciai, après, ce brave abbé, de la
bonne opinion qu'il avait conservée, de son voyage
à notre Exposition de 1889. Quatre
heures du matin. Nous nous levons pour franchir à cheval
les deux étapes, l'une de 40 kilomètres, l'autre
de 22 kilomètres, qui séparent la capitale de
Punta Arenas. Doit-on appeler chemin la route que nous suivons
? Que l'on se figure tantôt un bourbier glissant, tantôt
un petit sentier aux cailloux rocailleux qui longe la montagne.
Il est d'ailleurs impossible d'entretenir une route carrossable,
au Centre de l'Amérique: de mai à octobre il
pleut, ct il faut voir quelles trombes d'eau s'abattent sur
le pays! Tout est traversé, emporté: chemins,
ponts, voies ferrées. Chaque année on doit réparer
les dégâts causés par la saison des pluies
; c'est un vrai travail de Danaïdes.
Aussi n'entretient-on
plus de routes, mais l'on construit des chemins de fer, qui
résistent mieux aux intempéries. Actuellement
pour voyager on se sert des petits chevaux du pays. Ce sont
des poneys à l'aspect minable. Leur crinière
inculte flotte au vent: jamais ils n'ont connu l'étrille
ou la brosse. Dès leur arrivée au monde ils
vagabondent dans la prairie; le soir, ils s'endorment où
ils peuvent. Quelques pincées de maïs leur sont
distribuées quand on leur demande un travail sérieux,
mais bien souvent le maitre ne s'inquiète pas de leur
nourriture. Malgré le peu de soins qu'on leur donne,
ces petits chevaux, aux jambes fines et nerveuses, sont capables
de fournir de très longues courses. Dans les passages
difficiles il faut les laisser se diriger eux-mêmes,
en leur abandonnant les rênes sur le cou : souvent on
les voit s'arrêter, avancer un pied, tâter pour
ainsi dire le terrain, reculer, et choisir une autre route.
Ils ont évité un danger que vous ne soupçonniez
pas. Qui n'a pas voyagé dans des conditions pareilles,
a de la peine à s'imaginer la difficulté que
l'on éprouve à traverser des routes semblables.
Ce sont bien souvent des fondrières, où cavalier
et cheval disparaissent à mi-corps, parfois des bordures
étroites comme la largeur d'une gouttière, qu'il
faut longer : une monture européenne vous conduirait
infailliblement à la mort. Le seul défaut de
ces chevaux espagnols est de trotter l'amble.
La route qui
conduit à la capitale est bordée de propriétés
en général fort bien entretenues. Le voyageur
au Guatémala est frappé par la vue du désordre
incroyable dans lequel se trouvent champs, chemins et cultures
; ici, on a de suite l'impression que le Costa-Rica est un
pays bien cultivé et intelligemment entretenu. D'ailleurs,
il paraît qu'il existe dans cette république,
un bon nombre de petits propriétaires qui possèdent
un modeste avoir et le font rapporter. C'est encore un fait
sans précédent au Guatémala, où
seules les grandes « haciendas » de café
sont exploitées ; l'Indien n'y possède pas,
il travaille la terre d'un propriétaire quelconque.
La route,
à certains moments, est pavée de grosses pierres:
elle est très fréquentée. C'était
l'unique voie de communication avant la création du
chemin de fer de l'Atlantique. L'attelage ordinaire que l'on
rencontre se compose d'une paire de bœufs trainant une
voiture légère aux roues pleines - sans doute
pour empêcher la boue épaisse de couvrir les
essieux.
Un homme conduit
la voiture à la manière béarnaise. Armé
d'une longue gaule pointue, il dirige les bœufs, tandis
qu'un sifflement quelconque les arrête ou les fait avancer.
Parfois, dans les passages difficiles, le conducteur monte
sur la chaussée et excite de loin son équipage,
sans oser se risquer lui-même à travers cette
route dangereuse. Le long de cette route l'Indien fait place
à un blanc au teint basané.
Le costume
est européen. En général, les paysans
marchent pieds nus, le pantalon relevé jusqu'aux genoux
et la tête couverte d'un chapeau de paille de forme
pointue. L'aspect général est propre.
La route monte
sans cesse: nous côtoyons la montagne. Le passage le
plus beau et le plus difficile est l'ascension de l'Aguacate,
qui a 3000 pieds de haut. C'est une merveille de voir les
petits chevaux du pays franchir ces côtes longues et
abruptes avec une patience et une adresse incroyables.
La montée
se compose de cinquante-six tournants - pas un de moins -
taillés presque à pic sur le flanc de la montagne.
Arrivé au sommet on aperçoit, s'étendant
en une nappe immense, l'océan Pacifique, mais l'Atlantique
n'apparaît point. Ce n'est pas en cet endroit qu'Alvarado,
capitan d'Andalousie, a dû tomber à genoux remerciant
le Tout-Puissant pour la beauté du spectacle qu'il
lui était donné d'admirer. Quant à nous,
simples mortels, nous avons |
LA RUE PRINCIPALE DE SAN JOSÉ
EST DOTÉE
DE L'UNIQUE VOIE DE TRAMWAY |
longtemps regardé l'admirable baie,
toute parsemée d'îles, qui se déroulait
sous nos pieds. A plusieurs kilomètres l'on voit les
steamers qui s'éloignent vers Panama ou qui reviennent
des ports du nord de l'Amérique Centrale.
Tout le paysage
environnant est délicieusement vert: on Y aperçoit
de beaux arbres, et, quoiqu'il n'existe point de grandes forêts
au Costa-Rica, cette partie est très boisée.
Malheureusement ici, comme au Mexique, comme hélas!
dans toute l'Amérique Centrale, on coupe les bois avec
fureur. C'est vraiment dommage, car de quelque côté
que l'on se tourne, c'est, un enchantement des yeux, qui nait
de la contemplation des collines vertes où les cultures
diverses mettent des teintes différentes. Puis c'est
une succession de descentes et de montées, où
à chaque tournant tombent des cascades et s'épandent
des rivières. Souvent le brouillard entoure la montagne
comme d'un vaste manteau dont le soleil fait miroiter les
replis. Parfois, une éclaircie s'entr'ouvre, et l'on
s'imagine gravir une route sans base. |
SAN JOSÉ ,
CAPITALE DU COSTA-RICA, DONNE L'IMPRESSION D'UN NID DE VERDURE |
On a quelquefois appelé le Costa-Rica la Suisse de
l'Amérique Centrale, à cause de l'aspect pittoresque
que présentent ses montagnes. C'est vaguement la Suisse
; mais ici pas de trace de neige. Des montagnes de 3000 mètres,
des volcans encore en éruption, mais pas de glaciers.
Quand on songe qu'à cinq heures d'ici en dessous de
soi, tout est dévoré par la chaleur dans la
région basse où les habitants souffrent d'un
climat torride, on s'étonne de ne rencontrer aucun
sanatorium établi sur ces hauteurs.
Une descente
en pente douce et continue nous amène jusqu'à
Athènes, gros bourg qui forme la première halte.
Nous descendons dans un hôtel qui est de beaucoup supérieur
à tout ce que le Guatémala possède dans
des endroits similaires. Les chambres se composent d'un mobilier
des plus primitifs, mais les repas sont abondants et servis
d'une manière convenable. J'ai encore le souvenir de
quelques journées passées dans un hôtel
de l'Antigua, ancienne capitale du Guatémala, où
les garçons, avec une indifférence complète,
nous servaient des plats innombrables au milieu d'une saleté
repoussante. Dans cette maison, tout le monde chantait jusqu'à
cinq heures du matin, sans nul égard pour ses voisins.
Ici rien de pareil heureusement : on a quelque souci de l'ordre
et de la propreté.
Nous partons
de bonne heure. Le chemin se poursuit uniforme en ligne droite.
Une descente brusque; on aperçoit un vieux pont superbe
datant des Espagnols, où mugit un torrent, puis quelques
maisons blanches: c'est Alajuela, point où commence
l'amorce de la voie ferrée qui conduit à la
capitale. La ville possède un beau monument érigé
par un Français. Il représente un soldat de
ce pays qui, pareil à d'Assas, sacrifia sa vie pour
empêcher la capitale de tomber entre les mains de flibustiers
américains. Le fait le plus notoire de ce récit
c'est que ce Costa-Ricien était un nègre ; mais
après tout le courage n'est pas le monopole de la race
blanche.
Depuis le
village d'Athènes jusqu'à celui d'Alajuela,
nous avons rencontré de nombreux paysans conduisant
des troupeaux de petits porcs noirs au marché.
Tous ces hommes,
femmes ou enfants ont la peau blanche. C'est ce qui faisait
dire avec assez d'esprit au Président de la République,
don Pablo Iglesias, en parlant des habitants de son pays:
« Le soleil les brunit plus ou moins; mais vous ne rencontrez
plus d'Indiens au Costa-Rica. » Il est juste de constater
qu'ici la race blanche prédomine: non seulement les
Indiens ont fui devant les Espagnols, mais même leurs
rares survivants disparaissent peu à peu.
Le train qui
nous emporte vers la capitale rappelle, par ses wagons continus,
ceux des États-Unis. D'ailleurs, ce sont les Américains
qui sont les maîtres de toutes les voies ferrées
en Amérique Centrale: au Gua¬témala, c'est
Huntington, le roi de la Californie; au Costa-Rica c'est Keeth,
le roi des plantations de bananes, qui construisent ct possèdent
toutes les lignes. Elles n'en sont que plus confortables.
Les sièges, recouverts d'une épaisse garniture
de cuir jaune, sont doux et moelleux. De nombreuses glaces
reflètent à l'envi nos visages fatigués
et nos costumes couverts de boue.
La voie ferrée
suit une route plantée de caféiers, et sillonnée
de nombreux cours d'eau à chaque détour. Nous
croisons de petites stations qui me paraissent fort peuplées.
Au contraire de Guatémala, qui se trouve bâtie
sur un plateau nu et désolé et (lue n'entoure
à 50 kilomètres à la ronde aucune, ville
d'importance. San José de Costa-Rica est placée
au centre de la population la plus dense de la République.
Hérédia, Alajuela, Carthago, sont autant de
petites villes qui forment comme un essaim d'abeilles travailleuses
dont la ruche se trouve à San José. 200000 âmes
peuplent ce plateau et quoique la capitale soit une petite
ville de 30 000 habitants, elle est toujours animée
par le mouvement des passagers qui la traversent sans cesse.
Mais voilà
la ville qui apparaît à un tournant de la voie.
Une nuée de petites maisons au milieu de la verdure,
et par-ci par-là quelques dûmes blancs brillant
au soleil : telle se montre à nous la capitale de ce
beau pays.
San José
est une petite ville coquette, bien propre, où l'eau
coule à discrétion. Mme de Staël passant,
un jour, en Normandie, aperçut le village de Bernay
à travers le vert feuillage : « C'est un Éden
de verdure », écrit-elle dans ses Mémoires.
San José rappelle un pays identique. Un volcan éteint,
I'Irazu, vient mourir en pente douce aux: portes de la ville,
et cette vue donne seule la note grandiose à ce paysage
trop européen.
Comme toutes
les capitales de l'Amérique Centrale, San José
est tournée vers le Pacifique. Elle est cependant celle
qui est située le plus à cheval sur les deux
océans. Elle regarde deux civilisations: la Chine et
l'Europe; mais tandis que Guatémala, San Salvador et
le Nicaragua communiquent par rail avec le Pacifique, San
José est par le chemin de fer en relations directes
avec l'Atlantique. Aussi la capitale se ressent-elle de ce
voisinage, et il semble que les idées, les coutumes
de l'Occident aient pénétré plus vite
ici, que partout ailleurs. C'est la note américaine
qui domine. Des Espagnols, peu de "vestiges: plus de
grilles aux fenêtres, plus de rues étroites et
de pavés inabordables. Les maisons sont bâties
à l'européenne: en briques rouges, et à
un étage. Les fenêtres sont à châssis,
elles s'abaissent et se lèvent, Comme celles de Londres.
La ville est de fondation récente : l'ancienne capitale
Carthago est restée une ville espagnole. Ici les rues
sont très bien entretenues, et les voitures peuvent
nous conduire sans secousse jusqu'aux portes de notre maison.
Le trottoir étroit est construit en briques quadrillées.
A Guatémala
vous n'entendez parler que de la hausse ou de la baisse du
café, mais vous n'apercevez jamais un sac circulant
à travers la ville, car c'est fort loin de là
que poussa ce produit. A San José, au contraire, c'est
sur le plateau où est bâtie la capitale, que
l'on cultive, prépare et expédie cet article
de première nécessité, dans le monde
entier. |
AU-DESSOUS DE CARTHAGO, LA VOIE DEVIENT
EXTRÊMEMENT PITTORESQUE
|
Quand
on nous parle de San José de Costa-Rica on nous dit
: « C'est une ville européenne ; elle possède
même des tramways électriques. » Les tramways
se réduisent à une seule ligne, mais il est
juste d'ajouter que bien qu'unique, elle est la plus grande
distraction du pays.
Il n'y avait
aucune nécessité d'établir un pareil
système de communication, car la superficie de la capitale
est peu étendue: néanmoins, avec les habitudes
de paresse qui règnent ici, c'est une affaire d'or.
Le tramway traverse la ville d'un bout à l'autre, presque
en ligne droite. Dans chaque « car » ou voiture,
les directeurs, gens avisés, ont fait placer une profusion
de becs électriques, et le soir, les négresses
et mulâtresses et même toutes les élégantes
du pays montent dans le train pour se faire admirer et se
font conduire sans descendre, sur tout le parcours de la ligne.
Le tramway
passe, pareil à un météore, et les oisifs
peuvent, du seuil de leurs demeures, voir défiler toutes
les beautés de la ville : cela remplace presque les
« five o'clock ».
|
C'EST SUR LE PLATEAU MÊME DE SAN JOSÉ
QU'ON CULTIVE LE CAFÉ |
L'INTENSITÉ
DE LA VÉGÉTATION DANS UNE PLANTATION DE BANANIERS
|
« Ma chère,
descendez donc pour vous choisir un chapeau. » Je me
retourne. C'est une négresse qui, dans le plus pur
anglais, s'adresse à une compatriote, et les voilà
se dirigeant vers une vitrine brillamment éclairée.
Les étalages, ici, sont fort bien aménagés,
les nouveautés de Paris ne manquent .point. Toute la
nuit, les vitrines restent éclairées, bien que
les magasins soient fermés: éclairage délicieux
pour le noctambule.
Si les rues
de la capitale sont étroites, elles sont, par compensation,
assez animées. Tandis qu'à Guatémala,
après neuf heures du soir, on se croirait dans une
cité morte, ici on aperçoit des groupes à
chaque coin de rue jusqu'à une heure avancée
de la nuit. Les femmes sortent plus rarement. Pour se promener
dans la journée, les habitants de San José possèdent
un petit parc central bien exigu et bien laid. Une musique
militaire y donne des concerts tous les dimanches. Loin de
ce parc central, mais moins animé, il en existe un
autre aux proportions plus grandioses. Il domine la ville
et c'est un plaisir que d'y passer quelques moments. Des allées
couvertes d'arbres aux essences rares, de nombreux parterres
émaillés de fleurs exotiques, des roses, même
un petit pont en bois jeté au-dessus d'un lac, devraient
attirer le promeneur. Mais cependant personne ne le fréquente,
car il est à un quart d'heure de distance du centre,
et un quart d'heure en Amérique Centrale, représente
de longues heures chez nous.
A l'extrémité
nord de la capitale, s'étend une vaste plaine appelée
« la Sabane », On y a construit un champ de courses
dont les tournants sont si brusques qu'il ne se passe point
de réunion sportive sans chutes de chevaux ni de jockeys.
Fait intéressant pour les sportsmen: au Costa Rica,
les chevaux qui passent le poteau, même sans cavalier,
sont proclamés vainqueurs de la course.
Si les habitants
se soucient peu de posséder d'agréables promenades
pour se reposer de leurs fatigues dans la journée,
par contre ils tiennent beaucoup aux distractions du soir.
C'est dans ce but que l'on a construit un superbe théâtre
digne d'être placé à Paris ou dans toute
grande capitale. On a mis des années à mener
à bonne fin cette entreprise. Commencé, abandonné,
puis repris, il a fini par coûter 2 millions et demi
de piastres, 7 millions de francs, à l'État,
et ce n'est qu'en créant un impôt sur les exportations
du pays, que le Gouvernement est parvenu à le terminer.
Le monument,
vu de loin, rappelle notre Théâtre-Français,
mais en proportions modestes. Les portes franchies, on se
trouve devant une superbe antichambre supportée par
de belles colonnes de marbre. A droite, une buvette pour les
dames, à gauche, une autre pour les messieurs, toutes
deux fort bien achalandées. Les buffets sont joliment
travaillés, et le toit est couvert de belles fresques.
Le parterre
forme un vaste amphithéâtre; les sièges,
disposés en fer à cheval, sont spacieux et confortables.
Un large escalier en pierre mène au premier. Des loges
sans séparations n'attendent que les spectateurs. Celle
du Président se trouve placée au centre; une
fresque peinte sur le toit de la loge représente la
Justice tenant dans sa main un rameau d'or. |
DE PUERTO LIMON, LES COMMUNICATIONS
MARITIMES
SONT NOMBREUSES |
La
pièce la plus belle de ce monument est le foyer. Deux
escaliers en pierre y mènent. A peine entré
dans la salle, on se trouve dans un superbe salon décoré
de larges fenêtres. Un balcon magnifique permet aux
spectateurs de prendre l'air. Enfin, de grandes glaces reflètent
à l'en vi les boiseries et les cadres.
Au plafond,
de brillantes fresques représentent des Muses: celle
de la danse, placée au centre; à droite, celle
de la poésie : à gauche, celle de la tragédie.
Les peintures, finement dessinées, sont l'œuvre
d'un artiste italien.
De petits
salons annexes forment de charmants « retiro »
où la galanterie trouve son compte, m'a-t-on assuré.
S'il y avait un reproche sérieux à faire à
cette salle de spectacle, ce serait l'abus du clinquant et
de la dorure.
|
LE CHEMIN DE FER REMPLACERA LA ROUTE PEU PRATICABLE
|
Il
ne manque qu'une chose à ce théâtre :
ce sont des comédiens. Depuis trois ans, on n'ouvre
les portes que le jour de l'accession du Président
au pouvoir. Le trésor est vide, et nulle compagnie
ne se soucie de venir jouer un répertoire en vogue,
si loin de l'Europe. Aussi l'on se demande parfois avec tristesse
si l'utilité d'un pareil monument, était incontestable;
nous craignons 'bien qu'il soit disproportionné avec
les besoins du pays.
On rencontre
encore dans la ville des écoles nombreuses, des maisons
de correction bâties sur nos derniers plans, - d'ailleurs
trop spacieuses pour un pays composé d'une population
douce et tranquille. On a également élevé
des abattoirs où il ne manque que de l'eau pour devenir
des modèles dans ce genre de constructions.
Quand on a
parcouru San José de tous côtés, quand
on s'est perdu dans ses parcs si fleuris, qu'on a rêvé
au milieu des riants ombrages et admiré ses montagnes
toujours vertes, on garde l'impression d'un nid de verdure
entrevu par une journée de printemps. Ce n'est ni le
tableau d'une Amérique tropicale, ni la vision d'une
Andalousie brûlante qu'évoque cette petite capitale,
mais bien le souvenir de Lucerne sans son lac bleu, ou da
Nice sans la Méditerranée.
Nous reprenons
la route de l'Atlantique : la gare du départ est très
animée. De tous côtés se croisent des
trains. Le nôtre est formé de wagons Pulmann
très confortables. Un coup de sifflet, et à
l'heure exacte le départ a lieu. La ville disparait
vite à l'horizon, et le train s'enfuit vers Carthago,
l'ancienne capitale. Le chemin est une longue suite de montées,
et bientôt nous arrivons sur le faîte de la montagne
qui est la ligne de partage des eaux.
Carthago est
une petite ville tout empreinte du cachet espagnol, avec sa
place, ses arcades et son marché castillan. Ancienne
capitale, grâce à sa position géographique,
sa prospérité, depuis que San José l'a
supplantée, a subi un arrêt qui semble devoir
durer quelque temps encore. Mais la capitale découronnée
est du moins la métropole du Costa-Rica. Presque toutes
les familles dirigeantes du pays en sont issues. Elle boude
sa rivale, la cité parvenue de San José; ses
habitants sont plus défiants et plus casaniers, moins
actifs aussi. Toutefois le chemin de fer qui la met en communication
directe avec Puerto Limon ne peut manquer de transformer l'ancienne
ville, admirablement située pour le commerce, tout
près du seuil de partage entre les deux océans.
A partir de
ce point, la route devient extrêmement pittoresque.
Le chemin descend insensiblement, mais en traversant des ponts
qui surplombent des précipices. On côtoie la
montagne et, en passant le bras par la portière, on
peut en toucher les parois. Cette route est constamment entretenue,
car les éboulements sont fréquents. Des sources
d'eau chaude jaillissent parfois: c'est ainsi qu'on a créé
un établissement thermal à Agua Caliente. Il
est peu fréquenté, mais mériterait de
l'être davantage.
Le chemin
de fer avoisine le roc énorme qui barre la route. La
témérité des ingénieurs qui ont
créé cette voie est merveilleuse. Tout en haut,
un mur immense, une voie étroite où circule
le train, puis au-dessous du remblai la montagne, qui dévale
encore. Il suffit qu'un roc se détache de la montagne,
pour que le train soit écrasé, pareil à
une fourmi. Dans certains passages, on aperçoit des
centaines de noirs, qui des lances à la main, détachent
d'énormes blocs de terre pour élargir la voie.
Quand on traverse ces passages, on se sent vraiment angoissé.
Après
une route très accidentée, on arrive dans la
plaine. A la fraîcheur succède la moiteur des
pays tropicaux. Les moustiques et les nègres envahissent
les wagons. « Ma chère, passez-moi votre éventail
», et c'est une belle négresse qui adresse, toujours
dans le pur anglais, cette demande à sa voisine, tout
aussi noire qu'elle¬-même. C'est de la Jamaïque
et des Antilles anglaises que viennent tous ces travailleurs
noirs. Une compagnie américaine les engage pour deux
ans, les emmène sur ses propres bateaux, et les entretient
dans les plantations de bananes; puis, le contrat terminé,
ils sont transportés de nouveau dans leur pays. En
général, ces nègres, les plus intelligents
et les plus travailleurs de ceux vivant en Amérique,
réussissent à amasser un petit pécule.
D'autres nourrissent
leur famille; et c'est avec leur perroquet, leur femme, qu'ils
s'en retournent au pays après deux années de
labeur. Leur seul défaut est d'empoisonner les wagons
de leur odeur, Les négresses sont revêtues des
costumes aux couleurs les plus vives et aux tissus les plus
légers.
La ligne entre
tout à fait dans la plaine et l'on aperçoit
des deux côtés de la voie des plantations en
friche. Dans ces régions boisées où toutes
les essences se rencontrent, s'entremêlent, le planteur
n'a qu'une ressource: celle de mettre le feu. Après,
il plante le maïs, le manioc; mais c'est surtout la culture
de la banane qui demande le moins de soins et qui donne les
plus grands profits ...
Une rivière
porte son nom : Rio Banano.
Nous sommes
en pleine terre chaude: les caïmans et les oiseaux-mouches
foisonnent dans les vallées; le singe, le serpent,
le moustique et souvent la fièvre jaune attendent le
voyageur.
La ville terminus
du chemin de fer est Puerto Limon. C'est un quadrilatère
construit tout en bois: aussi un incendie l'a-t-il consumée
en entier il ya deux ou trois ans. La chaleur y est intense
d'un bout de l'année à l'autre. Malgré
les avantages de son port, elle ne pouvait s'élever
qu'après la construction de voies d'accès au
plateau. Grâce au chemin de fer, Limon est devenue soudain
l'égale de Punta Arenas pour l'importance commerciale;
et non seulement elle exporte les cafés du plateau,
mais encore les nouvelles plantations qui se sont fondées
dans le voisinage lui envoient d'énormes quantités
de bananes pour le marché des États-Unis.
Le bateau
qui doit nous emporter siffle une dernière fois, et
peu à peu disparaissent les derniers vestiges de cette
jolie terre d'Amérique. |
SAN JOSÉ.
L'ÉLÉGANT
FOYER DU THÉÂTRE NATIONAL |
Avant
de la quitter, je voudrais encore, en quelques lignes, montrer
avec quelle faveur- les étrangers sont accueillis à
San José. Les étrangers jouent d'ailleurs un
rôle prépondérant au Costa¬-Rica comme
dans toute l'Amérique Centrale; mais ici le Gouvernement
les traite avec sympathie, comme un ressort qui donne une
impulsion au pays et non comme un danger pour la République.
Ils sont fort nombreux. D'Espagne sont venus des émigrants
de Bilbao et de Barcelone, race travailleuse et énergique,
premiers pionniers de la colonisation. Ce sont eux qui, au
début de la conquête, ont fait souche de la race
actuelle. Arrivés beaucoup plus tard, mais très
nombreux, sont les Allemands. Ils forment une colonie unie,
tranquille et laborieuse. Ils s'unissent volontiers aux natifs
du pays, de telle sorte que le jour n'est pas éloigné
où ils se fondront au reste de la population. Enfin,
nous sommes heureux de constater que si les Français
sont moins nombreux, ils forment cependant; par les capitaux
qu'ils possèdent, une force importante. Le plus grand
exportateur de cafés est originaire de Bordeaux; un
autre Français est le représentant d'une banque
qui prêta plusieurs millions pour des entreprises dans
le pays. Enna les Américains jouent aussi un rôle
commercial important dans la région. |
LES TRAVAUX D'ART DE LA LIGNE DU PACIFIQUE :
DEUX PONTS MÉTALLIQUES SUR LE RIO GRANDE
|
Ce sont eux qui ont créé
les premiers chemins de fer, et qui entretiennent les compagnies
de bateaux en communication directe avec New York. Un des
leurs a monopolisé le commerce des bananes en achetant
des milliers de kilomètres de plantations.
Toutes ces
colonies étrangères vivent en excellents termes
entre elles et en rapports très cordiaux avec le
Gouvernement du Costa-Rica. Ici, comme au Guatémala,
et comme, du reste, du Mexique au cap Horn, le Gouvernement,
c'est le Président de la République M.Iglesias,
le président actuel, a été réélu
pour la troisième fois. Ce n'est d'ailleurs pas un
inconnu pour les Parisiens. Il est venu dans notre capitale
il y a deux ans, et y a passé plusieurs mois. C'est
un travailleur acharné. Comme Napoléon, il
a placé sa nombreuse famille dans les fonctions de
l'État. Le palais de la Présidence est une
maison fort simple qui ne se distingue des autres ni par
sa structure ni par l'importance du bâtiment. Ici
n'existe pas le faste du Guatémala, et pour pénétrer
jusqu'au Président, la route n'est point hérissée
de difficultés.
Dans le
cabinet de travail de M. Iglesias on voit accrochée
au mur une toile représentant les Dernières
Cartouches, d'Alphonse de Neuville.
Les révolutions
au Costa-Rica sont rares et elles ne révêtent
point ce caractère odieux qui, dans les autres républiques
hispano-américaines, en rend le souvenir si long
à effacer. Ici, point de fusillades générales
ni de prisons perpétuelles. On exile simplement les
têtes les plus chaudes. Depuis
plus de vingt ans on n'a point de souvenance de guerre civile.
Un vent de paix et de travail souffle sur ce petit pays.
Aussi les progrès matériels du Costa-Rica
sont constants et réguliers. On peut en juger par
l'accroissement de la population qui, de 80000 habitants
en 1844, s'est élevée à 120500 en 1864,
à plus de 182000 en 1883; le dernier recensement,
qui remonte il 1892, accuse. 243 200 habitants.
Depuis le
milieu du siècle dernier, le commerce a quintuplé;
actuellement il oscille, suivant les années de 45
à 50 millions. La Grande-Bretagne, les Etats-Unis,
la France, l'Allemagne, tel est l'ordre des diverses nations
avec lesquelles le Costa-Rica fait des échanges.
La police,
excellente, est une juste garantie de la liberté.
Quant à l'armée, elle est un modèle
Inconnu dans les autres parties de l'Amérique Centrale.
Le soldat n'est plus un déguenillé, mais lin
homme bien vêtu, agile, instruit. C'est un plaisir
et une leçon de voir l'CR hommes .manœuvrer
dans les places publiques. Deux mille hommes forment le
noyau de l'armée, mais tous les habitants font un
service de deux mois.
L'instruction
n'est pas non plus en retard. Non seulement San José
possède des écoles de garçons, mais
il en existe aussi pour les filles. D'ailleurs, si l'on
juge de la profusion des journaux pour l'avancement des
idées, sachez qu'il s'en 'publie dix par jour, seulement
dans la capitale du pays. Les câbles apportent chaque
matin des nouvelles d'Amérique et d'Europe.
Il suffit
de jeter un coup d'œil aux vitrines des libraires,
pour s'apercevoir que les derniers romans de nos boulevards
franchissent sans retard l'Atlantique pour être lus
au Costa-Rica.
Des communications
faciles et rapides mettent d'ailleurs ce petit pays en relations
avec l'Europe et l'Amérique. De Puerto Limon part
tous les quinze jours un bateau de la Compagnie Transatlantique
pour Panama, les Antilles et Saint-Nazaire. Une compagnie
anglaise, la Royal Mail et une italienne, la Compagnie Rubattino
ont établi un service régulier, la première
entre Liverpool et San José, la seconde entre Naples,
Gênes et le Costa-Rica.
Des États-Unis,
deux fois par semaine, arrivent les courriers de New York
et de la Nouvelle-Orléans.
Enfin, sur la côte du Pacifique, tous les bateaux
qui remontent de l'Amérique du Sud vers San-Francisco,
et qui descendent de ce port vers le Pérou et le
Chili, font escale à Punta Arenas.
Si les communications
du dehors assurent au Costa-Rica des relations faciles avec
l'étranger, à l'intérieur son chemin
de fer avec le Pacifique, qui circule deux fois par jour,
offre un facile débouché à ses produits.
Bientôt cette ligne deviendra transcontinentale, et
nombreux seront les voyageurs qui préféreront
prendre ce chemin sain ct pittoresque, au lieu d'affronter
la fièvre jaune en permanence à Panama.
Enfin si,
dans un avenir prochain, les Américains, qui nous
ont fait assister à tant de prodigieux projets exécutés
par eux, mènent à bien l'œuvre du Canal
de Panama, commencée par nous, un nouvel essor sera
donné à toute l'Amérique Centrale,
et des cinq petites républiques c'est le Costa-Rica,
en tête par l'avancement de ses idées et par
ses progrès matériels, qui sera le premier
aussi à profiter de cette nouvelle vie donnée
à ces riches contrées, - si ignorées
de nous autres Français.
SAILLARD
LE PARC CENTRAL DE SAN JOSÉ
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Mise à jour : avril 2012 |
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